CJUE : quelle protection pour les pièces détachées automobiles ?
Un constructeur automobile peut-il interdire l’usage pour des calandres d’un signe identique ou similaire à la marque dont il est titulaire ?Le constructeur automobile Audi est titulaire d'une marque figurative de l’Union européenne représentant quatre cercles qui se chevauchent, enregistrée, entre autres, pour des véhicules, des pièces détachées et des accessoires automobiles.
Cette marque est reproduite et utilisée en tant qu’emblème d’Audi. Le constructeur a agi en justice contre un commerçant polonais qui offrait à la vente, en en faisant la publicité sur son site internet, des calandres non originales adaptées pour d’anciens modèles de voitures Audi. Ces calandres comportaient un élément dont la forme était similaire ou identique à cette marque et conçu pour la fixation de l’emblème d’Audi. Saisi de ce litige, le juge polonais a demandé à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) si la commercialisation des pièces détachées automobiles constituait, selon le règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017, un "usage d’un signe dans la vie des affaires" susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque Audi et si le titulaire de cette marque pouvait interdire à un tiers un tel usage. Dans son arrêt rendu le 25 janvier 2024 (affaire C-334/22), la CJUE relève tout d’abord que la clause de réparation prévue pour les dessins ou modèles n’est pas applicable. Ensuite, elle note que, en l’occurrence, les calandres ne proviennent pas du titulaire de la marque Audi et sont mises sur le marché sans le consentement de celui-ci. Or, l’élément conçu pour la fixation de l’emblème d’Audi y est intégré aux fins de la commercialisation des calandres par le tiers. Il est visible pour le public souhaitant acheter une telle pièce détachée. Cela pourrait constituer un lien matériel entre la pièce détachée en question et le titulaire de la marque Audi. Dès lors, un tel usage est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque consistant notamment à garantir la provenance ou la qualité du produit. La Cour ajoute que, lorsque le choix de la forme de l’élément conçu pour la fixation de l’emblème du constructeur automobile est guidé par la volonté de commercialiser une calandre qui ressemble d’une manière aussi fidèle que possible à la calandre originale, le droit de l’Union ne limite pas le droit exclusif de ce constructeur titulaire de la marque d’interdire de faire usage d’un signe identique ou similaire.