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Revenge porn : l'ampleur du préjudice moral

La cour d’appel de Limoges réévalue le préjudice moral subi par une lycéenne confrontée à la diffusion sur les réseaux sociaux de vidéos intimes d’elle à son insu : outre une chute de ses résultats scolaires, une situation de honte et d’angoisse nécessitant un suivi psychologique, le juge prend en considération la longue et fastidieuse procédure nécessaire afin d’effacer toutes traces des vidéos en cause.Par un jugement du 27 mai 2021, le tribunal correctionnel de Limoges a reconnu un jeune homme coupable d’atteinte à l’intimité de la vie privée par fixation, enregistrement ou transmission de l’image d’une personne présentant à caractère sexuel.Les juges du fond ont retenu que les faits avaient causé un important préjudice moral à la victime en ce que des vidéos intimes d’elle avaient circulé sur les réseaux sociaux pendant plusieurs mois alors qu’elle était encore scolarisée en lycée.

Cette exposition publique avait entraîné une baisse de ses notes, un épisode dépressif et l’obligation pour elle de suivre des soins psychologiques. L'auteur des faits a été condamné au paiement de 1.300 € en réparation du préjudice moral et 300 € en réparation du préjudice matériel. Dans un arrêt rendu le 20 mai 2022, la cour d'appel de Limoges relève que si le préjudice n’est pas contesté par l'auteur, il convient cependant d’en examiner le contexte, à savoir des échanges d’images et vidéos privées présentant un caractère sexuel, détournées par l’un des destinataires à l’insu de la personne figurant sur ces échanges et mis sur la place publique à l’échelon mondial du réseau internet, via des sites à caractère pornographique. Cela en indiquant le nom, le prénom et la ville d’origine de la personne figurant dénudée dans les vidéos en cause. La cour estime que si l'auteur soutient qu’il n’a pas mesuré la portée et les conséquences de son acte, cela n’altère en rien l’importance du préjudice moral qu’il a causé à la victime, caractérisé par une chute des résultats scolaires de cette dernière, une situation de honte et d’angoisse compte tenu de l’identification des vidéos, signalées via le réseau Facebook par des inconnus, et la nécessité d’un suivi psychologique.Aux composantes de ce préjudice moral, s’ajoute la longue et fastidieuse procédure nécessaire afin d’effacer toutes traces des vidéos en cause et l’identification de la victime au moyen des moteurs de recherche avec renvoi sur des sites pornographiques. Ne pouvant "que mesurer l’ampleur du préjudice subi", la cour d'appel décide de reconsidérer la somme allouée en réparation à la victime afin de l'adapter "à la véritable dimension du préjudice moral causé". Elle condamne ainsi l'auteur à verser une somme de 5.000 € à la victime en réparation de son préjudice moral. En outre, il lui sera allouée une somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles engagés dans le cadre de cette instance.