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Le "plus gros porc français" n'est pas injurieux

La Cour de cassation invalide la condamnation pour injure publique du militant ayant qualifié Eric Ciotti de "plus gros porc français", en réaction à l'intervention du député relative à l'accueil en France de migrants lybiens à bord de l'Aquarius : quoiqu'outrageants, ces propos, qui exprimaient une opinion sur un mode satirique, dans un contexte polémique, n'ont pas dépassé les limites de la liberté d'expression.Le 12 juin 2018, le militant du droit des migrants Cédric Herrou a publié sur son compte Twitter les propos suivants : "j'ai trouvé le plus gros porc français qui accueille tout le misérabilisme du monde !! @ECiotti champion du monde !!!", puis, le lendemain : "quand @ECiotti dit en 2018 mettons les migrants en Lybie, il dirait en 1940 menons-les dans les chambres à gaz".

Le député Eric Ciotti a alors déposé une plainte avec constitution de partie civile des chefs, d'une part, d'injure publique envers un citoyen chargé d'un mandat public, d'autre part, de diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public. La cour d'appel d'Aix-en-Provence a déclaré le prévenu coupable d'injure envers un citoyen chargé d'un mandat public.Les juges du fond ont retenu qu'il avait admis à l'audience le caractère excessif de ses propos qu'il avait mis sur le compte d'un mauvais jeu de mot entre "port" et "porc", et, donc, d'une certaine ironie. Ils ont ajouté que le fait de traiter quelqu'un de "porc" était une injure qui n'avait pas été proférée dans l'élan spontané du débat télévisé auquel le prévenu n'assistait pas mais sur un compte Twitter, après coup, dans un délai susceptible de permettre d'éviter ce genre d'emballement verbal, même si le problème soulevé s'inscrit dans le contexte d'intérêt général de la politique migratoire.Les juges en ont conclu que la divergence d'opinion ne justifiait pas la grossièreté et que le terme "porc" était bien une expression outrageante au sens de l'article 29, alinéa 2, de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Ce raisonnement est invalidé par la Cour de cassation le 31 mai 2022 (pourvoi n° 21-82.097) : pour la chambre criminelle, le propos poursuivi, outrageant à l'égard de la partie civile, mais exprimant l'opinion de son auteur sur un mode satirique, dans un contexte polémique, au sujet des idées prêtées à un responsable de parti politique, ne dépassait pas les limites admissibles de la liberté d'expression au sens de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'Homme.