Skip to main content

CEDH : pas de reconnaissance faciale pour identifier et localiser un manifestant

Le recours à la technologie de reconnaissance faciale pour identifier et localiser un manifestant pacifique, ne menaçant ni l’ordre ni la sécurité publics, est particulièrement intrusif et contraire à la Convention EDH.L’affaire concerne l’utilisation par les autorités de la technologie de reconnaissance faciale contre M.

Glukhin après que celui-ci se fut livré à une manifestation solo dans le métro de Moscou en Russie. L’intéressé fut identifié puis localisé grâce à la technologie de reconnaissance faciale après avoir voyagé avec une silhouette en carton grandeur nature d’un manifestant dont le cas avait été largement médiatisé qui brandissait une banderole sur laquelle on pouvait lire : "Je risque jusqu’à cinq ans (...) pour des manifestations pacifiques". Dans son arrêt Glukhin c/ Russie du 4 juillet 2023 (requête n° 11519/20), la Cour européenne des droits de l’homme dit, à l’unanimité, qu’il y a eu violation de l’article 8 (droit au respect de la vie privée) et violation de l’article 10 (liberté d’expression) de la Convention européenne des droits de l’Homme. La Cour considère que M. Gluhkin a cherché à exprimer son opinion sur une question d’intérêt public et que l’article 10 de la Convention laisse peu de place aux restrictions de ce droit.Les autorités n’ont toutefois fait preuve d’aucune tolérance à l’égard de sa manifestation en solo, laquelle présentait incontestablement un caractère pacifique et n’a fait peser aucune menace sur l’ordre ou la sécurité publics. Elles n’ont d’ailleurs aucunement vérifié si l’utilisation par M. Glukhin d’une silhouette en carton brandissant une banderole s’analysait en une expression de ses opinions.Ainsi, les juridictions internes n’ont pas avancé de "raisons pertinentes ou suffisantes" pour justifier que M. Glukhin ait été conduit jusqu’au poste de police, placé en état d’arrestation et condamné, en violation de son droit à la liberté d’expression tel que garanti par l’article 10 de la Convention. Elle estime que les mesures prises contre M. Glukhin ont revêtu un caractère particulièrement intrusif face à ce qui avait été une manifestation pacifique qui n’avait représenté aucune menace pour la sécurité du public ou des transports. En réalité, à la suite de cette manifestation, le requérant n’a été poursuivi que pour infraction mineure.Le traitement des données personnelles biométriques du requérant au moyen de la technologie de reconnaissance faciale dans le cadre d’une procédure pour infraction administrative – qui a poursuivi d’abord le but de l’identifier à partir des photographies et de la vidéo publiées sur Internet puis celui de le localiser et de l’interpeller alors qu’il voyageait dans le métro de Moscou – n’a donc pas répondu à "un besoin social impérieux" et ne pouvait être considéré comme "nécessaire dans une société démocratique".Partant, il y a eu violation de l’article 8 de la Convention.