CEDH : le licenciement d'une enseignante pour de prétendus "actes immoraux" est condamné
Le licenciement d'une enseignante, accusée d'actes immoraux pour avoir publié des photos d'elle embrassant une autre femme sur les réseaux sociaux, contrevient aux articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme.Une enseignante russe a été convoquée à une réunion et informée de l'existence d'un dossier sur sa vie privée constitué par une organisation non gouvernementale.
Ce dossier contenait, entre autres, des photos de l'intéressée embrassant d'autres femmes. Elle a finalement été licenciée pour "actes immoraux incompatibles avec la poursuite d'activités d'enseignement". La justice russe a donné raison aux autorités scolaires. Dans un arrêt rendu le 7 mai 2024 (requête n° 49014/16), la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) donne raison à l'enseignante. En effet, la Cour estime que la décision de licencier l'intéressée s'analyse en une ingérence dans l'exercice par cette dernière de son droit au respect de sa vie privée. Le licenciement de l'enseignante à raison de photos, qui n'étaient pas obscènes, est une mesure manifestement disproportionnée au but de la protection de la morale. De plus, la CEDH juge que l'orientation sexuelle d'un individu ne peut être isolée de l’expression publique et privée de celle-ci, qui relève à l'évidence de la protection de la vie privée au sens de l'article 8. En l'espèce, la publication de photos montrant des moments d'intimité avec un partenaire est un "élément de base" des réseaux sociaux, et la réaction hostile de l'employeur à une telle publication révèle une non-acceptation de l'orientation sexuelle de l'intéressée. Par suite, le licenciement a porté une atteinte disproportionnée à ses droits fondés sur l'article 8 au seul motif de son orientation sexuelle. La CEDH conclut à la violation de l'article 8 et de l'article 14 combiné à l'article 8.