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Droit de réponse : la critique du journaliste est possible

Ne porte pas atteinte à l’honneur du journaliste auteur de l’article, la réponse qui se contente de critiquer, dans des termes proportionnés à cet article, la légitimité du but poursuivi par celui-ci, le sérieux de son enquête, sa prudence dans l’expression ou son absence d’animosité personnelle.A la suite de la publication dans un quotidien régional d’un article intitulé "Sanction béton pour le promoteur" et sous titré "Le promoteur X.

Ne porte pas atteinte à l’honneur du journaliste auteur de l’article, la réponse qui se contente de critiquer, dans des termes proportionnés à cet article, la légitimité du but poursuivi par celui-ci, le sérieux de son enquête, sa prudence dans l’expression ou son absence d’animosité personnelle.A la suite de la publication dans un quotidien régional d’un article intitulé « Sanction béton pour le promoteur » et sous titré « Le promoteur X. a été lourdement condamné financièrement pour ne pas avoir vérifié si son sous-traitant bulgare n’était pas un adepte du travail dissimulé », la personne citée a demandé l’insertion d’une réponse au directeur de la publication du quotidien.Cette réponse n’ayant pas été publiée, l’intéressé a fait citer le directeur de la publication devant le tribunal correctionnel du chef de refus d’insertion.
La cour d’appel de Bordeaux l’a débouté de sa demande.Les juges du fond ont énoncé que l’article auquel il était répondu rendait compte de la condamnation de l’intéressé et commentait, non sans ironie, le jugement récemment rendu contre lui.Ils ont ajouté que l’auteur de la réponse détaillait les circonstances des faits qui lui avaient été reprochés, mais mettait également en cause les qualités et l’honnêteté intellectuelles du journaliste, lui reprochant de n’avoir pas vérifié les informations publiées, de cacher la vérité ou de travestir la réalité, y compris de façon déplaisante ou ridicule, ce qu’impliquait le recours au qualificatif « caricatural », et d’avoir manqué d’objectivité.Les juges ont conclu que la réponse n’était pas en corrélation avec l’article ni proportionnée à lui et était contraire à l’honneur du journaliste, de sorte que le directeur de la publication était fondé à en refuser l’insertion.
Dans un arrêt rendu le 1er septembre 2020 (pourvoi n° 19-81.448), la Cour de cassation censure cette décision.
Elle rappelle qu’il se déduit de l’article 13 de la loi sur la liberté de la presse que la réponse dont l’insertion est demandée ne porte pas, dans des conditions de nature à interdire sa publication, atteinte à l’honneur du journaliste, auteur de l’article auquel il est répondu, lorsqu’elle se contente de critiquer, dans des termes proportionnés à cet article, la légitimité du but poursuivi par celui-ci, le sérieux de l’enquête conduite par son auteur, sa prudence dans l’expression ou son absence d’animosité personnelle.
Or, dans sa réponse, qui restait intégralement en corrélation avec l’article initial, le requérant se contentait de contredire plusieurs des affirmations de celui-ci, en regrettant à trois reprises que son auteur n’ait pas pris contact avec lui ou avec son avocat, ce qui aurait, selon lui, évité la publication de ce qu’il qualifiait d’approximations ou d’informations inexactes, et aurait permis d’informer les lecteurs sur le fait que le jugement dont il était rendu compte était frappé d’appel.
La Haute juridiction judiciaire estime que cette critique des méthodes du journaliste, exprimée en termes sévères mais mesurés, était restée proportionnée à la teneur de l’article initial, dont les juges du fond avaient exactement retenu le ton ironique.