CJUE : les plateformes en ligne, non responsables de la mise en ligne illégale par leurs utilisateurs d’œuvres protégées
Selon l’avocat général près la CJUE, les exploitants de plateformes en ligne ne sont pas directement responsables de la mise en ligne illégale d’œuvres protégées effectuée par les utilisateurs de ces plateformes.
Selon l’avocat général près la CJUE, les exploitants de plateformes en ligne ne sont pas directement responsables de la mise en ligne illégale d’œuvres protégées effectuée par les utilisateurs de ces plateformes. Mais les titulaires de droits devraient pouvoir obtenir des injonctions judiciaires à leur égard, susceptibles de leur imposer des obligations.Des titulaires de droits d’auteur ont poursuivi des plateformes en ligne (Youtube et Uploaded) au sujet de la mise en ligne d’œuvres sans l’autorisation des ayants droit.
Dans ses conclusions en date du 16 juillet 2020 (affaire C-682/18), l’avocat général près la CJUE, Henrik Saugmandsgaard Øe, propose à la Cour de juger que des exploitants des plateformes en ligne ne sont pas directement responsables d’une violation du droit exclusif reconnu aux auteurs par la directive 2001/29 de communiquer au public leurs œuvres, lorsque les utilisateurs de leurs plateformes mettent en ligne de manière illicite des œuvres protégées. En effet, selon l’avocat général, ces exploitants n’effectuent, en principe, pas eux-mêmes un acte de « communication au public » dans cette hypothèse. Le rôle joué par ces exploitants serait, en principe, celui d’un intermédiaire fournissant des installations permettant aux utilisateurs de réaliser la « communication au public ». La responsabilité primaire susceptible de résulter de cette « communication » serait donc, en règle générale, endossée uniquement par ces utilisateurs. L’avocat général ajoute que la directive 2001/29 n’a pas vocation à régler la responsabilité secondaire, c’est-à-dire la responsabilité des personnes qui facilitent la réalisation, par des tiers, d’actes de « communications au public » illicites. Cette responsabilité, qui implique généralement la connaissance de l’illicéité, relèverait du droit national des États membres.
De plus, de tels exploitants de plateformes en ligne pourraient, en principe, bénéficier de l’exonération de responsabilité prévue par la directive 2000/31 pour les fichiers qu’ils stockent à la demande de leurs utilisateurs, pour autant qu’ils n’aient pas joué un « rôle actif » de nature à leur conférer « une connaissance ou un contrôle » des informations en question, rôle que, en principe, ils ne jouent pas.
L’avocat général précise que les hypothèses dans lesquelles l’exonération en cause est exclue, à savoir lorsque le prestataire de services a « effectivement connaissance de l’activité ou de l’information illicite » ou « connaissance de faits ou de circonstances selon lesquels l’activité ou l’information illicite est apparente », se réfèrent, en principe, à des informations illicites concrètes. Autrement, il y aurait un risque que les exploitants de plateformes se transforment en arbitres de la légalité en ligne et un risque que ces exploitants n’opèrent un « surretrait » des contenus qu’ils stockent à la demande des utilisateurs de leurs plateformes, en supprimant également des contenus licites.
Enfin, l’avocat général propose de juger que, indépendamment de la question de la responsabilité, les titulaires de droits peuvent obtenir, en vertu du droit de l’Union, des injonctions judiciaires à l’encontre des exploitants de plateformes en ligne, susceptibles de leur imposer des obligations. Les titulaires de droits doivent en effet pouvoir demander une telle injonction dès lors qu’il est établi que des tiers portent atteinte à leurs droits, via le service des exploitants de plateformes, sans devoir attendre qu’il y ait eu récidive et sans avoir à démontrer un comportement fautif de l’intermédiaire.