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TUE : une marque péjorative n'est pas descriptive

Si le terme "cinkciarz" présente un caractère allusif ou suggestif à l’égard des services licites de change de devises, il nécessite un effort d’interprétation du public et présente, de ce fait même, une certaine originalité et prégnance qui le rendent facilement mémorisable et est apte à indiquer au consommateur l’origine commerciale des produits ou des services en cause.

Si le terme « cinkciarz » présente un caractère allusif ou suggestif à l’égard des services licites de change de devises, il nécessite un effort d’interprétation du public et présente, de ce fait même, une certaine originalité et prégnance qui le rendent facilement mémorisable et est apte à indiquer au consommateur l’origine commerciale des produits ou des services en cause.

Une société a présenté une demande de nullité de la marque Cinkciarz, déposée notamment pour des services de change de devises et de gestion financière, au motif en raison du caractère descriptif du signe et de son absence de caractère distinctif.
Dans un arrêt rendu le 19 décembre 2019, le Tribunal de d’Union européenne (TUE) relève que le terme Cinkciarz présente deux acceptions :- l’une historique, dans laquelle il désigne une personne qui se livrait clandestinement et illégalement au change de devises à l’époque de la République populaire de Pologne ;- l’autre contemporaine, dans laquelle ce terme est employé dans un sens dérivé, général, comme synonyme d’escroc ou de fraudeur, mais également, dans un sens proche de l’acception historique, pour désigner une personne pratiquant actuellement encore le commerce clandestin et frauduleux, et donc illégal, de devises. En revanche, il n’a pas été établi que le terme « cinkciarz » désigne actuellement, de façon neutre, une personne ou une entreprise fournissant des services de change de devises.
Le TUE retient que le public pertinent étant conscient du fait que les services couverts par la marque contestée ne peuvent pas être des activités clandestines et illégales de change de devises, le terme « cinkciarz » ne peut pas servir, dans un usage normal du point de vue du public pertinent, pour désigner les services de change de devises licites. Le public pertinent ne pourra établir un lien entre la marque contestée et les services licites de change de devises qu’en surmontant cette contradiction pour parvenir à la conclusion que, par ironie et l’effet d’un jeu de l’esprit, ladite marque, contrairement à sa signification, couvre des services de change de devises fournis de manière licite.Le Tribunal ajoute qu’il est peu probable que ce terme perde à l’avenir la connotation qui lui est consubstantielle, et, en conséquence, désigne de façon neutre l’exercice d’une activité de change de devises.
Enfin, le TUE considère que si le terme « cinkciarz » présente un caractère allusif ou suggestif à l’égard des services licites de change de devises, il nécessite un effort d’interprétation de la part dudit public et présente, de ce fait même, une certaine originalité et prégnance qui le rendent facilement mémorisable et est apte à indiquer au consommateur l’origine commerciale des produits ou des services en cause.
Partant, il y a lieu de reconnaître audit terme un caractère distinctif à l’égard des services de change de devises.

– TUE, 1ère chambre, 19 décembre 2019 (affaire T‑501/18 – ECLI:EU:T:2019:879), Currency One S.A. c/ Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) – http://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf;jsessionid=35421FAF7C4EEFE378F5E77D1AE2EB61?text=&docid=221763&pageIndex=0&doclang=FR&mode=lst&dir=&occ=first&part=1&cid=2713562