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Précision sur le délit de publication d'identité d'une victime d'agression sexuelle

L'article 39 quinquies de la loi sur la liberté de la presse, qui incrimine la diffusion d'image ou de renseignement sur l'identité d'une victime d'agression ou d'atteinte sexuelles sans son accord écrit, n'exige pas que celle-ci ait été reconnue comme telle par décision définitive de condamnation de l'auteur des faits.Une femme a porté plainte contre un homme pour le délit de publication d'identité d'une victime d'agression sexuelle, prévu et réprimé par l'article 39 quinquies de la loi du 29 juillet 1881, à la suite de la publication de propos révélant son identité, alors qu'il savait qu'elle y était opposée, lors d'une émission télévisée, dans un communiqué de presse mis en ligne sur un site internet ainsi que dans un ouvrage.Le procureur de la République a fait citer l'intéressé de ce chef devant le tribunal correctionnel, d'une part, comme auteur principal, s'agissant du communiqué de presse et de l'émission télévisée, d'autre part, comme complice de ce même délit, s'agissant de l'ouvrage précité, le directeur de cette publication étant, quant à lui, cité en qualité d'auteur principal.

Le tribunal correctionnel les a déclarés coupables et a condamné notamment l'auteur à 3.000 € d'amende dont 2.000 € avec sursis.Les prévenus et la partie civile ont formé appel à titre principal, le ministère public à titre incident. Pour déclarer l'auteur coupable, infirmer le jugement sur la peine et le condamner à 1.000 € d'amende, la cour d'appel de Paris a énoncé en substance qu'il importait peu que l'identité de la victime ait déjà été révélée ou que celle-ci ait contribué à son identification, l'article 39 quinquies de la loi du 29 juillet 1881 visant la seule diffusion d'informations concernant l'identité d'une victime.Les juges du fond ont relevé qu'au surplus, si la requérante avait pu diffuser des photographies sur lesquelles elle pouvait être identifiée, elle avait constamment dissimulé son état civil, communiquant uniquement sous pseudonyme.Ils ont retenu que le prévenu avait, dans ces circonstances, agi en connaissance de cause et ne démontrait pas que la diffusion du nom de la victime était nécessaire à l'exercice des droits de la défense.Les juges ont ajouté qu'une peine d'amende était adaptée à la nature, à la durée et à la gravité des faits, ainsi qu'à la personnalité, la situation sociale et professionnelle et aux revenus du prévenu, qui avait sciemment diffusé l'identité de la requérante dans un ouvrage ainsi que dans deux autres médias, sans avoir recueilli son accord écrit.Ils ont conclu qu'il devait toutefois être tenu compte du fait que la requérante avait elle-même contribué à son identification, notamment en diffusant sa photographie et en faisant figurer son nom en qualité d'organisatrice d'une cagnotte en ligne pour dénoncer les agissements imputés au prévenu. Dans un arrêt rendu le 7 février 2023 (pourvoi n° 22-81.057), la Cour de cassation valide cette analyse, s'appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme, dès lors qu'en l'espèce la publication litigieuse ne contribuait pas à un débat d'intérêt général. SUR LE MEME SUJET : Liberté d'expression ou respect de la vie privée : un éternel débat - Legalnews, 15 février 2012