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Contrefaçon et rencontre fortuite

La contrefaçon d’une œuvre de l’esprit peut être écartée lorsque les similitudes existant entre les deux œuvres procèdent d'une rencontre fortuite ou de réminiscences issues d'une source d'inspiration commune. Le cas échéant, la preuve de la rencontre fortuite doit être rapportée par le contrefacteur prétendu.Soutenant que les chansons intitulées "Aïcha 1" et "Aïcha 2" contrefaisaient la composition musicale dénommée "For Ever" dont il était l'auteur, un artiste a assigné l'auteur-compositeur, par ailleurs éditeur des deux œuvres arguées de contrefaçon ainsi que le coauteur des arrangements et le coéditeur, aux fins d'obtenir réparation de l'atteinte prétendument portée à ses droits moraux et patrimoniaux d'auteur.Il a, ensuite, attrait à l'instance l'auteur d'une partie des paroles écrites en arabe de l'oeuvre intitulée "Aïcha 2".

Dans un arrêt rendu sur renvoi après cassation (pourvoi n° 14-11.944), la cour d'appel de Versailles a rejeté l'ensemble de ces demandes.Après avoir énoncé qu'il appartient à celui qui invoque l'existence d'une rencontre fortuite d'en rapporter la preuve par la production de tous éléments utiles, les juges du fond ont estimé que le défendeur établissait que l'oeuvre "For Ever" avait eu une diffusion limitée en Suisse sur la station "Radio Rhône", ainsi que dans un bar et des discothèques, et que, si celui-ci s'était produit à Lausanne, cette station n'y était pas reçue et les établissements en cause en étaient éloignés, de sorte qu'il n'en avait pas eu connaissance et que les similitudes entre les oeuvres en cause résultaient d'une rencontre fortuite, exclusive d'une contrefaçon. La Cour de cassation considère que la cour d'appel s'est ainsi prononcée dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, sans accueillir une exception de bonne foi ni inverser la charge de la preuve.Dans son arrêt du 5 octobre 2022 (pourvoi n° 20-23.629), elle rappelle qu'il résulte des articles L. 111-1, L. 111-2 et L. 122-4 du code de la propriété intellectuelle que l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur celle-ci, du seul fait de sa création et indépendamment de toute divulgation publique, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, et que la contrefaçon de cette oeuvre résulte, indépendamment de toute faute ou mauvaise foi, de sa seule reproduction et ne peut être écartée que lorsque celui qui la conteste démontre que les similitudes existant entre les deux oeuvres procèdent d'une rencontre fortuite ou de réminiscences issues d'une source d'inspiration commune. SUR LE MEME SUJET : Conditions de recevabilité de l'action en contrefaçon dirigée à l'encontre d'une oeuvre de collaboration - Legalnews, 14 octobre 2015